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« Celui qui ne prévoit pas les choses lointaines s’expose à des malheurs prochains »
Conficius (551-479 av. J.-C.)
Au début des années 2000, l’apparition du Web s’est accompagnée d’une transformation des usages en vigueur sur internet. Les médias sociaux ont bouleversé les habitudes et les comportements des internautes et des professionnels sur le web.
Face à cet outil difficilement contrôlable, pour les organisations et les institutions, communiquer en état de crise n’a jamais été sans risque, aujourd’hui plus que jamais. Ces dernières ont de nouveaux défis à relever afin de diffuser la bonne information, au bon moment et à la bonne personne en respectant les règles et objectifs définis, en prenant le moins de risques possibles.
En 2020, nombreux sont les gouvernements / entreprises / institutions convaincus d’être prêts pour toute situation de crise. Le mot « crise » vient du mot grec « krisis », qui signifie « décision » ou encore « la faculté de décider ». De par son sens terminologique, le mot crise signifie « une prise de décision » qui est l’idée de la mise en œuvre d’une action. En effet, lors d’une crise, il faut surtout décider et agir en étant appuyé par des modes de fonctionnement performants, à savoir prendre la bonne décision, au bon moment pour engendrer si possible les impacts souhaités.
Les cas de crises d’entreprises sont nombreux : crise alimentaire (Quick) ; crise commerciale (SFR) ; crise sociale (SNCF) ; crise technique (Toyota) ; crise éthique (Christian Dior) ; crise environnementale (Total) etc… Mais, les crises les plus marquantes et les plus médiatisés sont sans doute les crises sanitaires : Grippe pandémique (tous les ans), épidémie de fièvre Zika en Amérique (2015), épidémie de maladie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest (2013-2015), grippe aviaire (1997, 2009 et 2013), poulets à la dioxine (1999), la Vache Folle (1996-2017) et sang contaminé (1984).
Les raisons de la forte médiatisation des crises sanitaires se cachent dans leurs caractéristiques : l’intervention de différents et de nouveaux acteurs, l’excès de l’usage des outils de communication (de nos jours des Réseaux Sociaux), l’importance des enjeux (sociaux, économiques) et surtout une incertitude croissante.
La crise sanitaire est un évènement touchant réellement, ou potentiellement, un grand nombre de personnes, affectant la santé et pouvant éventuellement augmenter le facteur significatif de mortalité ou surmortalité. Elles sont déclarées par l’État et certaines d’entre elles font l’objet d’un scandale sanitaire, lorsque la confiance des citoyens est en jeu.
Le Covid-19, déclaré comme la « crise sanitaire mondiale majeure de notre époque » a saisi un très grand nombre de pays dans le monde. La Chine, pays de naissance de la pandémie, a été le premier pays à prendre des précautions radicales afin de stopper la maladie. Dès janvier, face à cette crise d’envergure médiatisée, les questions sont : est-ce que l’Etat français a pris toutes les précautions nécessaires ?Est-ce que le gouvernement a eu une bonne stratégie de communication de crise ? Analysons ….
La « phase préliminaire » de la crise Covid-19 a été rapide : les premiers signaux d’alerte sont apparu dans un autre pays mais ces signes ont été négligés par le gouvernement français et certaines déclarations de la part de la Ministre de la Santé, Mme Agnès Buzyn, ont eu pour objectif de minimiser les faits, donc de réduire l’impact sur l’opinion publique. La « phase aiguë » a démarré avec les premiers décès et a pris de l’ampleur avec l’augmentation de ce chiffre. La fameuse « phase 3 » s’est insérée dans cette période où l’Etat et l’opinion publique ont pris conscience de la gravité de la situation. Même si aujourd’hui, nous sommes toujours dans la phase aiguë, la phase « chronique » paraît être assez proche : nous attendons impatiemment la stagnation du nombre des malades, des patients hospitalisés et des décès. Quant à la dernière phase du cycle de vie d’une crise, la phase chronique, elle est loin de nous…
Quant aux stratégies de communication adoptées, nous avons eu droit à une très grande diversité mais qui a réduit l’impact positif de ces communications et qui a retardé la mise en vigueur d’une stratégie solide mais surtout rationnelle. Durant toutes ces périodes, les personnalités politiques sont passées d’une stratégie de communication de crise à une autre : le « dénis » (ignorance du danger et des risques de la crise). Il a été la première stratégie adoptée. Elle a été suivie par celle de la « reconnaissance partielle » où la responsabilité de l’Etat a été reconnue, ce dernier a commencé à faire preuve d’initiatives et d’engagements importants auprès de l’opinion publique. Mais, cette responsabilité a été vite partagée avec celle du corps médical. La stratégie de « dissociation » est apparue quand l’Etat s’est déresponsabilisé en montrant du doigt le manque de masques à cause de la situation actuelle en Chine.
La crise Covid-19 a confirmé une autre fois « notre rapport à l’information, nos rapports aux autres et surtout notre rapport avec le temps et la crise ». Ces phénomènes ont bouleversé les schémas théoriques de la crise et ont remis en cause sa définition. Traditionnellement, une crise suit un certain nombre d’étapes qui correspondent à un temps précis : le temps de l’alerte, le temps de la mobilisation, le temps de réponse et le temps de retour d’expérience.
Les médias sociaux, du fait de leur rapidité et de leur instantanéité, ont impacté fortement l’ampleur et la médiatisation de cette crise. L’immédiateté de l’information sur les réseaux sociaux et sur les médias traditionnels a séduit davantage l’opinion publique lors du confinement. Le traitement de l’information a changé : tous, nous aimons nous approprier le message, jouer avec, commenter, discuter, polémiquer, exprimer nos angoisses, propager des rumeurs. Mais, l’atout le plus important des réseaux sociaux a été reconfirmé en cette période de confinement : nous nous sentons moins seuls, nous avons des millions d’amis mais surtout nous vivons car NOUS COMMUNIQUONS !
Dr. Belgin BILGE
Le 15/04/2020